Contribution à la réflexion relative au Dialogue politique inclusif et sans tabou initié par le Président de la République

10 janvier 20170
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La crise sociopolitique que traverse le Gabon divise visiblement sa classe politique entre les acteurs qui soutiennent Jean Ping, l’actuel numéro un de l’opposition qui a récemment organisé le dialogue pour l’alternance, et ceux qui sont pour le dialogue d’Ali Bongo Ondimba dont le pouvoir est très contesté au sein de la population gabonaise. Berni BIE EMANE un sénateur du PDG, le parti présidentiel depuis 1968, livre son opinion à ce sujet.

Lors de son discours d’investiture du 27 septembre 2016, le Président de la République, Son Excellence Ali BONGO ONDIMBA, a invité la classe politique gabonaise et la Société civile à un dialogue inclusif, sans tabou et sans suspicion. Il a par la suite instruit son nouveau Premier Ministre, Emmanuel ISSOZE NGONDET, de travailler à sa tenue dans les plus brefs délais.

Ce dernier a tout logiquement inscrit ce Dialogue politique au nombre des priorités de son Gouvernement, qui compte d’ailleurs un Ministre d’Etat expressément dédié. C’est ainsi que, au lendemain de sa déclaration de politique générale à l’Assemblée nationale, le Premier Ministre a entamé une série de consultations officielles avec les différents acteurs politiques de notre pays, de la majorité comme de l’opposition, pour cerner le cadre des discussions futures, ainsi que les contours. Comment en est-on arrivé là ? Et un dialogue pourquoi pour quoi faire ?

En politique, le dialogue est généralement conçu comme un processus cohérent de communication et de négociations ayant pour but d’arriver à un consensus sur des questions qui engagent la vie d’une communauté, mais divisent les principaux acteurs. Comme tout dialogue, le dialogue politique se veut interactif. S’il y a donc dialogue, ou invitation au dialogue, c’est parce qu’on a constaté un certain déficit dans les échanges, des incompréhensions, voire un malaise profond dans les relations politiques entre les fils d’un même pays. Ce qui n’est pas sans préjudice pour le fonctionnement des administrations, nuit considérablement au vivre-ensemble. Les risques à terme d’un tel climat sont nombreux, notamment une probable implosion sociale, avec pour corollaire la méfiance des investisseurs étrangers, voire locaux dans notre pays.

C’est dire que le dialogue politique a pour objectif la recherche des solutions aux problèmes politiques qui minent la société . Déjà en 1990, tirant les conséquences d’une situation sociopolitique délétère, le Président Omar BONGO décida de convoquer une Conférence nationale, qui déboucha notamment sur la restauration du multipartisme, l’instauration des élections pluralistes, la mise en place d’un certain nombre d’institutions pour consolider notre démocratie naissante.
A l’époque jeune cadre dans le parapublique, j’y avais pris une part active, particulièrement au sein de la Commission des institutions de la République, présidée par feu Simon OYONO ABA’A, et qui comprenait nombre de personnalités qui allaient par la suite jouer chacun un rôle dans la vie publique de notre pays : ....
Mais, trois ans après la Conférence nationale d’avril-mai 1990, plus précisément après l’élection présidentielle de décembre 1993, on assista à une autre dégradation du climat sociopolitique, marquée par des violences dont la sortie nécessita la convocation d’autres pourparlers entre acteurs politiques gabonais, à Paris en 1994. Ces pourparlers débouchèrent sur ce que l’on appela les "Accords de Paris", dont l’un des acquis majeurs reste la mise en place d’une Commission électorale indépendante qui relégua au second plan le rôle du ministère de l’Intérieur dans le processus électoral.

Quant aux "Accords d’Arambo’", conséquence des contestations postélectorales de la présidentielle de 2005, ils ont été l’occasion d’un toilettage du code électoral pour renforcer la transparence des scrutins : conception d’un autre type d’enveloppes pour le vote, remise des procès-verbaux aux représentants de tous les candidats après dépouillement et, dans une certaine mesure, décision d’introduire certaines données biométriques l’élaboration du fichier électoral et de la liste électorale.
Comme on peut le constater, chaque fois que la sérénité du climat sociopolitique a été menacée, la tenue d’un dialogue s’est révélée nécessaire pour surmonter les différends, et non pour proscrire les différences dans le débat politique, nécessairement contradictoire en démocratie. Le Gabon a ainsi réussi à éviter d’emprunter le chemin qui mène au chaos.

C’est fort de ces vertus du dialogue que le Président Ali BONGO ONDIMBA a convié toute la classe politique à un dialogue, afin de trouver des solutions aux problèmes qui se posent au Gabon actuellement, et qui, incontestablement, entament l’image du pays et freinent son développement. Ce climat s’est exacerbé au lendemain de l’élection présidentielle du 27 août 2016, suite à la contestation par Jean PING et les siens de la victoire du candidat du Parti démocratique gabonais (PDG). La société politique gabonaise s’est alors divisée essentiellement en deux blocs quasi-irréconciliables.

Pour en sortir, le dialogue reste la principale arme contre les affres de la division, de la haine, afin que les Gabonais réapprennent à se parler, à travailler ensemble pour le bien de tous et de chacun. Sinon, comment trouver des solutions à nos problèmes collectifs si l’on ne se met pas autour d’une même table pour en débattre ? dixit Casimir Oyé Mba. Comment restaurer la confiance entre les enfants d’un même pays s’ils ne se parlent pas ? Comment vouloir par exemple la restauration des élections à deux tours, la limitation du nombre de mandats électifs, la révision de certaines de nos institutions et le mode de désignation de leurs membres, si ce n’est par le dialogue et la concertation, c’est-à-dire par le partage des idées et leur discussion afin d’en tirer la solution la moins contestable possible ?Est-il admissible que, sous d’autres cieux les acteurs politiques se battent sur les idées et ceux du Gabon sur les opportunités. A mon entendement, le dialogue politique n’est que la confrontation des idées divergentes. Evidemment on ne viendra jamais dialoguer lorsqu’on est à cours d’idée sur les différents thèmes.

Le rejet du dialogue signifie le soutien du statut quo. Si on peut convenir que certaines de nos institutions mériteraient un dépoussiérage et une adaptation au contexte actuel, le dialogue, tel qu’envisagé par le Président de la République, reste la solution idoine pour y parvenir. Dans cette veine, le Premier Ministre s’est engagé devant la Représentation nationale à tout mettre en œuvre pour que ce dialogue soit organisé et aboutisse à des conclusions qui seront profitables à tous.

Répondre positivement à cet appel ne signifie nullement adhérer au PDG ni à ses idéaux, mais placer l’intérêt du peuple gabonais et du Gabon au-dessus de nos intérêts partisans et personnels, en apportant notre pierre à la construction de l’édifice Gabon.

C’est pourquoi, je suis pleinement favorable à ce dialogue et invite tous ceux qui sont épris de paix et qui se soucient du développement de notre pays à y prendre part. Le Gabon a besoin de tous ses enfants, de même que ses enfants ont tous besoin d’un Gabon où l’on se parle et où il fait bon vivre..

Dialoguons !

Berni BIE EMANE
Sénateur de Makokou, ancien commissaire au sein
de la Commission des Institutions de la Conférence Nationale de 1990

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