Ma tribune sur la suspension du PDG recommandée par le DNI

11 mai 20240
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La suspension des partis politiques préconisée par le récent Dialogue National Inclusif n’est pas un fait nouveau en République Gabonaise. Depuis la création du système Bongo-PDG, Omar Bongo, Ali Bongo Ondimba et leurs gouvernements respectifs ont plusieurs fois dissout tout ou partie des formations politiques, sans qu’aucune autorité constitutionnelle s’en émeuve.

Mesdames et Messieurs,
Chers compatriotes,

Dès le 13 mars 1968, le Ministre de l’intérieur Monsieur Augustin Boumah avait dissout tous les partis politiques légalement constitués, et il avait immédiatement consacré comme parti unique le PDG que ses amis et lui avaient créé la veille à Koulamoutou.

N’oublions pas qu’à l’époque Monsieur Jean Hilaire Aubame Eyeghe qui avait été condamné à dix ans de travaux forcés suite au coup d’État militaire de février 1964, était encore en détention et qu’il y restera jusqu’en 1972, paraît-il quotidiennement humilié et tabassé par ses geôliers.

Avant le décret promulgué par le futur président de l’Assemblée Nationale, aucune formation politique n’avait eu le temps de tenir une assemblée générale pour décider de son propre sort, et aucune institution de la République n’avait requis le strict respect des lois et réglementations en vigueur, visiblement pour une raison simple : toutes étaient dirigées par les fondateurs du nouveau Parti-État.

Nous constatons d’ailleurs que depuis le retour au multipartisme en 1990, les incalculables congrès du Parti Démocratique Gabonais n’ont jamais condamné ces violations honteuses des droits et libertés que leurs pères fondateurs avaient outrageusement commises entre mars 1968 et mars 1990 contre des centaines de milliers de concitoyens.

Le 23 février 1990 lors d’un discours radiotélévisé, le président Omar Bongo avait unilatéralement dissout le Parti Démocratique Gabonais (PDG) et annoncé la création immédiate du Rassemblement Social-Démocrate Gabonais (RSDG), soi-disant comme nouveau laboratoire du retour au multipartisme.

Le Bureau Politique du PDG n’avait même pas eu la permission de convoquer un congrès extraordinaire pour permettre aux militants de décider de leur avenir commun. Et aucune institution de l’époque ne s’était opposée à cette énième mesure unilatérale qui violait les lois et réglementations en vigueur.

Le Parti Démocratique Gabonais dût sa survie à la seule Conférence Nationale Souveraine d’avril 1990, qui d’une part cassa cette décision inique du Président Bongo et d’autre part imposa le retour immédiat au multipartisme intégral.

Là encore le Parti Démocratique Gabonais n’a jamais pris la peine de remercier les acteurs de l’opposition qui avaient ferraillé un mois durant contre Omar Bongo pour lui imposer le respect des droits et libertés de tous les gabonais.

Par ces rappels historiques qui ne sont pas exhaustifs, nous remarquons trois choses. La première, les pédégistes n’ont jamais exigé le strict respect des lois et réglementations en vigueur lorsque les gouvernants déviants étaient des leurs.

La deuxième, les militants PDG n’ont jamais contesté une mesure dictatoriale qui avait été prise à leur bénéfice exclusif : ils n’ont jamais manifesté leur loyauté envers l’État de droit quitte à perdre des privilèges politiques extrêmement précieux.

La troisième, le Dialogue National Inclusif d’avril 2024 est venu corriger la résolution de la Conférence Nationale Souveraine de 1990 qui avait exagérément laissé le PDG continuer à exister sans rendre aucun compte à la Nation Gabonaise.

Pour autant la suspension des partis politiques en général et du Parti Démocratique Gabonais en particulier devrait trouver des justificatifs dans des évidences où l’ordre public, la stabilité politique, la sécurité nationale et la démocratie ont été gravement menacées pendant les 57 dernières années. Sur le cas précis du PDG, nous n’avons pas forcément besoin de fouiller trop loin pour le confondre.

Entre le 28 octobre 2018 et le 30 août 2023, le Parti Démocratique Gabonais a délibérément hypothéqué notre sécurité nationale pour se maintenir au pouvoir par tous les moyens.

Après le très grave accident médical du Président de la République Ali Bongo Ondimba, les cadres politiques du PDG ont manipulé les institutions constitutionnelles qui étaient sous leur autorité absolue, pour empêcher toutes possibilités de déclaration de vacance du pouvoir. Une situation chaotique qui a entraîné une première insurrection militaire le 07 janvier 2019, réprimée dans le sang par les tenants du système Bongo-PDG.

Les institutions constitutionnelles dirigées par des hauts cadres PDG ont sciemment abandonné notre pays à des bandes de pillards économiques qui se sont succédés à la Présidence de la République, manipulant impunément le cachet du Chef de l’État et imitant à souhait la signature du Président de la République.

N’eût été la prise héroïque de responsabilité de nos Forces de Défense et de Sécurité, le Parti Démocratique Gabonais aurait continué à duper infiniment les gabonais.

La preuve c’est que les mêmes militants PDG ont persisté dans leur jusqu’au-boutisme en investissant le très maladif Ali Bongo Ondimba comme candidat à un troisième mandat présidentiel, conscients pourtant que le chef de l’État sortant était irrémédiablement diminué.

Entre juillet et août 2023, l’écrasante majorité des parlementaires, des ministres, des MBP, des MCN et des MCC du Parti Démocratique Gabonais, parmi lesquels le très respecté Premier Ministre Paul Biyoghe-Bi-Mba, ont publiquement soutenu que leur candidat Ali Bongo Ondimba était le meilleur architecte et le meilleur chef de chantier pour le développement optimal du Gabon.

Sauf que six mois plus tard, précisément le 07 février 2024, le même Premier Ministre Paul Biyoghe-Bi-Mba devenu Premier Vice-Président du Parti Démocratique Gabonais, donnera aux populations des raisons très convaincantes pour lesquelles le désormais président déchu n’était pas en capacité de continuer à diriger le PDG.

Comment donc comprendre que le meilleur choix des pédégistes pour tout le Gabon soit subitement devenu très mauvais pour diriger le Parti Démocratique Gabonais ? Ces multiples contradictions ne sauraient rester indéfiniment sans conséquence.

La Nation Gabonaise mérite d’avoir accès aux informations médicales de l’ancien Président de la République, au même titre que les cadres politiques du PDG qui visiblement les possèdent.

Les gouvernants politiques issus du Parti Démocratique Gabonais ont profondément affaibli les institutions constitutionnelles en général et l’institution présidentielle en particulier, en laissant prospérer la multiplication des sosies présidentiels, les pillages économiques, la paralysie du gouvernement et les conflits de compétences au sein du pouvoir exécutif.

De ce fait la suspension du Parti Démocratique Gabonais pourrait être une mesure temporaire pour aboutir à la dissolution de cette formation politique, le temps d’enquêter sur les responsabilités de celui-ci dans le chaos général des cinq dernières années du régime d’Ali Bongo Ondimba.

Il est important de souligner que cette suspension devrait se faire dans le strict respect des principes démocratiques et des droits fondamentaux. Cette mesure devrait être encadrée par des garanties juridiques et constitutionnelles, et viser à restaurer non seulement la vraie démocratie au sein des partis politiques et des institutions constitutionnelles, mais aussi la paix sociale et la stabilité de notre pays le Gabon.

Honneur et Fidélité à la Patrie,
Que Dieu bénisse le Gabon.

Libreville, le 07 mai 2024
Philippe César Boutimba Dietha

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